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Eric Boyer | Dimanche 5 Septembre 2021 01:00 | Commentaires (0)

BIOGRAPHIE


Evariste DE PARNY (1753-1814)

 

Évariste Parny de son vrai nom Evariste Désiré De Forges chevalier puis vicomte De Parny est né à Saint-Paul de l’île Bourbon.

C’est vers l’âge de neuf ans qu’il quitte l’île de la Réunion pour faire des études à Rennes.

Il choisit une carrière militaire et devient officier de la garde de Louis XV. C’est à la suite d’un court séjour sur l’île en 1773, qu’il s’éprend d’une jeune créole qui épouse un autre que lui. Il sombre dans un désespoir amoureux.

 

Il est élu à l’Académie française et devient membre de l’Institut en 1813. Il est le premier académicien réunionnais.

 

 

 

La place de son œuvre dans la littérature

Dans un style élégiaque Ses poésies érotiques (en 1778) et Elégies, traduisent ses amours malheureuses, et séduisent le public du XVIIIe siècle.

 

« Cherchons des voluptés nouvelles ;
Inventons de plus doux désirs ;
L'amour cachera sous ses ailes
Notre fureur et nos plaisirs. »

(Extrait du recueil poésies érotiques- T’aimer est le bonheur suprême)

 

A travers les Chansons Madécasses (ancien nom qui désigne les habitants de Madagascar) il invente une nouvelle forme littéraire qui est la prose (1787).

 

La Guerre des Dieux (1799) est un poème satirique qui lui a valu de nombreuses plaintes dès sa parution . « Il s'agit d'une satire du monde clérical ainsi que d'une violente critique de quelques dogmes, notamment les doctrines de la Trinité et de la virginité de Marie ». Sujet de scandale dans les milieux conservateurs parisiens, il fait l’admiration auprès d’autres écrivains notamment d’un poète russe Pouchkine qui disait de lui « Parny c’est mon maître »

 

 

Il dénonce les violences colonialistes et les injustices faites aux peuples qui sont colonisés.

 

« Les blancs promirent, et cependant ils faisaient des retranchements. Un fort menaçant s'éleva ; le tonnerre fut renfermé dans des bouches d'airain ; leurs prêtres voulurent nous donner un Dieu que nous ne connaissions pas ; ils parlèrent enfin d'obéissance et d'esclavage : plutôt la mort !  Le carnage fut long et terrible ; mais malgré la foudre qu'ils vomissaient et qui écrasait des armées entières, ils furent tous exterminés. Méfiez-vous des blancs. »

(Extrait des chansons madécasses-Chansons 5).
 

 

Bibliographie

 

Poésie et prose:

-Épître aux insurgents de Boston, pamphlet. Paris: sne, 1777.

-Poésies érotiques. Paris: sne (« À l’isle de Bourbon »), 1778.

-Opuscules poétiques. Amsterdam: sne, 1779.

-Oeuvres de M. le chevalier de Parny, contenant ses opuscules poétiques et ses poésies érotiques. À l’Isle de Bourbon: Lemarié, 1780.

-Chansons madécasses, traduites en français, suivies de Poésies fugitives par Évariste Parny. Avec trente vignettes gravées sur bois, en couleurs, par J. E. Laboureur. À Londres et à Paris: Hardouin et Gattey, 1787.

-Oeuvres complètes du chevalier de Parny. 2 Vols. Paris: Hardouin et Gattey, 1788.

-La guerre des Dieux. 1799. La Guerre des dieux anciens et modernes, poëme en 10 chants, 2e édition. Paris: Didot, an VII. La guerre des Dieux, poème en dix chants. Paris: Debray, 1808.

-Goddam, poème en 4 chants. 1804. 3e édition, Paris: Capelle et Renaud, an XII.

-Porte-feuille volé, contenant: 1. Le paradis perdu, poème en quatre chants; 2. Les déguisements de Vénus, tableaux imités du grec; 3. Les galanteries de la Bible, sermon en vers. Paris: Debray, 1805.

-Les voyages de Céline, poème. Paris: Debray, 1806.

-Les Rose-Croix, poème en douze chants. Paris: Renouard et Debray, 1807.

-Poésies inédites. Paris: Tissot, 1808.

-Oeuvres d’Evariste Parny. Paris: Debray, 1808, 1812.

-Oeuvres complètes de Parny. Bruxelles: A. Wahlen, 1824; Bruxelles: J.P. Meline, 1834.

-Parny. Œuvres complètes, textes présentés et annotés par Gwenaëlle Boucher. 4 vols. Paris: L’Harmattan, 2010. Vol. 1: La Guerre des Dieux, Les Déguisements de Vénus; Vol. 2: Les Galanteries de la Bible, Le Paradis perdu, Goddam, Les Rose-Croix; Vol. 3: Isnel et Asléga, Jamsel, Le Voyage de Céline, Élégies, La Journée champêtre, Le Promontoire de Leucade, Les Fleurs, Les Tableaux, Chansons madécasses; Vol. 4: Mélanges, Opuscules, Lettres, Réponses, Discours de réception à l’Académie française.

 

 

 

Parenthèse poétique





L'amour est éteint pour la vie

 

J'ai cherché dans l'absence un remède à mes maux ;
J'ai fui les lieux charmants qu'embellit l'infidèle.
Caché dans ces forêts dont l'ombre est éternelle,
J'ai trouvé le silence, et jamais le repos.
Par les sombres détours d'une route inconnue
J'arrive sur ces monts qui divisent la nue :
De quel étonnement tous mes sens sont frappés !
Quel calme ! quels objets ! quelle immense étendue !
La mer paraît sans borne à mes regards trompés,
Et dans l'azur des cieux est au loin confondue.
Le zéphir en ce lieu tempère les chaleurs ;
De l'aquilon parfois on y sent les rigueurs ;
Et tandis que l'hiver habite ces montagnes,
Plus bas l'été brûlant dessèche les campagnes.

Le volcan dans sa course a dévoré ses champs ;
La pierre calcinée atteste son passage :
L'arbre y croît avec peine ; et l'oiseau par ses chants
N'a jamais égayé ce lieu triste et sauvage.
Tout se tait, tout est mort ; mourez, honteux soupirs,
Mourez importuns souvenirs
Qui me retracez l'infidèle,
Mourez, tumultueux désirs,
Ou soyez volages comme elle.
Ces bois ne peuvent me cacher ;
Ici même, avec tous ses charmes,
L'ingrate encor me vient chercher ;
Et son nom fait couler des larmes
Que le temps aurait dû sécher.
O dieux ! ô rendez-moi ma raison égarée ;
Arrachez de mon cœur cette image adorée ;
Éteignez cet amour qu'elle vient rallumer,
Et qui remplit encor mon âme tout entière.
Ah ! l'on devrait cesser d'aimer
Au moment qu'on cesse de plaire.

Tandis qu'avec mes pleurs la plainte et les regrets
Coulent de mon âme attendrie,
J'avance, et de nouveaux objets
Interrompent ma rêverie.
Je vois naître à mes pieds ces ruisseaux différents,
Qui, changés tout-à-coup en rapides torrents,
Traversent à grand bruit les ravines profondes,
Roulent avec leurs flots le ravage et l'horreur,
Fondent sur le rivage, et vont avec fureur
Dans l'océan troublé précipiter leurs ondes.

Je vois des rocs noircis, dont le front orgueilleux
S'élève et va frapper les cieux,
Le temps a gravé sur leurs cimes
L'empreinte de la vétusté.
Mon oeil rapidement porté
De torrents en torrents, d'abîmes en abîmes,
S'arrête épouvanté.
O nature ! qu'ici je ressens ton empire !
J'aime de ce désert la sauvage âpreté ;
De tes travaux hardis j'aime la majesté ;
Oui, ton horreur me plaît ; je frissonne, et j'admire.

Dans ce séjour tranquille, aux regards des humains
Que ne puis-je cacher le reste de ma vie !
Que ne puis-je du moins y laisser mes chagrins !
Je venais oublier l'ingrate qui m'oublie,
Et ma bouche indiscrète a prononcé son nom ;
Je l'ai redit cent fois, et l'écho solitaire
De ma voix douloureuse a prolongé le son ;
Ma main l'a gravé sur la pierre ;
Au mien il est entrelacé.
Un jour le voyageur, sous la mousse légère,
De ces noms connus à Cythère
Verra quelque reste effacé.
Soudain il s'écria : Son amour fut extrême ;
Il chanta sa maîtresse au fond de ces déserts.
Pleurons sur ses malheurs, et relisons les vers
Qu'il soupira dans ce lieu même.


 

 
 







Eric Boyer | Dimanche 5 Septembre 2021 00:52 | Commentaires (0)

BIOGRAPHIE


Carpanin MARIMOUTOU

 

Né en 1956 dans une famille nombreuse, Jean-Claude Carpanin Marimoutou a passé son enfance à Saint-Benoît. Il part faire ses études à Montpellier. Il obtient le CAPES en 1981 et l’agrégation en 1983. En 1990 il soutient une thèse de doctorat intitulée : "Le roman réunionnais, une problématique du même et de l'autre. Essai sur la poétique du texte romanesque en situation de diglossie"

 

Il enseigne la littérature française à l’Université de la Réunion depuis 1984. Il est poète et critique littéraire. Son engagement dans la vie culturelle, le conduit à réaliser des traductions en créole réunionnais de pièce de théâtre : « Le Médecin malgré lui » de Molière, « L’ours » & « La demande en mariage » d’Anton Tchekhov ; il a traduit en français la pièce de Vincent Fontano « Tanbour ».

Carpanin Marimoutou a aussi été l’un des membres fondateurs du groupe Ziskakan pour lequel il écrit des textes

 

La place de son œuvre dans littérature

 

 

Le poète Carpanin Marimoutou s’interroge sur la société réunionnaise issue d’horizons multiples : Afrique, Madagascar, Inde, Chine, Europe, .... construite dans la violence (traite négrière, esclavage, commerce colonial). Son questionnement est tourné sur ce qui cimente cette île, qui était inhabitée, qui a construit une identité réunionnaise :

« ...Nos yeux sont rouges de tant de départs

mais nous avons réappris ensemble

les gestes incertains des combats communs… »

(Extrait de Approches d’un cyclone absent- Éditions Page Libre-1991)

 

La langue d’écriture du poète prend sa source dans les identités, les cultures issues des différentes origines de la population réunionnaises, en particulier la culture malbaraise dans laquelle il a baigné dans son enfance :

« ...i fé padèl dovan la kaz

i kas koko pou done kouraz

i fé padèl dovan la kaz

lo safran konm pou in mariaz... »

(Extrait de Narlgon la lang, éditions K’A, 2002)

 

 

Véronique Corinus de la Bibliothèque municipale de Lyon dit ceci à propos du poète Carpanin Marimoutou « ...Son écriture poétique se fonde sur l’interrogation de ce que signifie habiter une île sans autochtonie originelle, sans passé pré-colonial, dont la fondation repose sur la mise en esclavage d’êtres humains dont aucun n’était originaire de l’île… Danseur d’une autre terre, Marimoutou creuse dans la créolité du lieu son langage propre, terrier singulier où co-existent les langues, les textes et les mondes. »

 

Dense et ancrée/encrée à la fois dans l’espace réunionnais et ouverte au monde, l’écriture de Carpanin Marimoutou donne à lire une Île multiple et une.

 

 

 

Bibliographie poétique

-Fazèle-éditions Les Chemins de la Liberté-1978

-Arracher cinq mille signes-Editions Goutte d’Eau dans l’Océan-1980-

- Approches d’un cyclone absent-Editions Page Libre-1991

-6 fonnkèr pou band lèt la pèrd la bann-Editions K’À-2000

-Narlgon la lang,-Editions K’A-2002

-Shemin maniok-Editions K’A-2009



Parenthèse poétique

 

Moin la parti pèsh in rèv


 
 

Moin la parti pès in rèv

dann limon basin la mèr

moin la souk zangiy zamalé

té ki sort zoué basin la pé

oté lo tan lo tan kokiye

lo tan sovrèt lo tan papang

mon kèr i dor sou in galé

lot koté la kroi zibilé

kan la rivièr i kanz la mèr

la rivièr dé ros sinonsa basin blé

moin la parti pès in rèv

paranba péi mon lémé

dann lèr la pli, laba létan

moin la dormi promié tournan

 

oté lo tan lo tan kokiye

lo tan sovrèt lo tan papang

mon kèr i dor sou in galé

lot koté la kroi zibilé

kan la rivièr i kanz la mèr

la rivièr dé ros sinonsa basin blé

moin la parti pès in rèv

dann kèr kouran kanal bofon

moin la pèrd in koté soulié

zis sou ranpar la pièr tayé

 

oté lo tan lo tan kokiye

lo tan sovrèt lo tan papang

mon kèr i dor sou in galé

lot koté la kroi zibilé

kan la rivièr i kanz la mèr

la rivièr dé ros sinonsa basin blé

 

moin la parti pès in rèv

dann milié la rivièr marsoin

moin la trouv in larmé vèrdtèr

bordlo sou lo pon somindfèr

 

oté lo tan lo tan kokiye

lo tan sovrèt lo tan papang

mon kèr i dor sou in galé

lot koté la kroi zibilé

kan la rivièr i kanz la mèr

la rivièr dé ros sinonsa basin blé

 

moin la parti poz in pièz

pour trap in rèv la kour boukan

moin la parti poz in pièz

mi asiz dann in pti koin lo tan








Eric Boyer | Dimanche 5 Septembre 2021 00:41 | Commentaires (0)

BIOGRAPHIE


ALAIN LORRAINE (1946-1999)
 

Alain Lorraine est né à Saint-Denis le 2 novembre 1946. A deux ans, il connaît son premier exil en métropole ; Il revient sur l’île pour son service militaire et pour poursuivre ses études à l’Université de la Réunion.

 

Il devient journaliste à « Témoignage Chrétien de la Réunion » où il découvre la réalité économique et sociale locale avec le Père Christian Fontaine entre autres.

En 1975, il crée un mouvement en faveur de la culture réunionnaise, la « culture du fénoir », il milite en faveur de l’autonomie de l’île.

 

En 1981 Il fonde le journal Fanal « un fanal qui naît, c’est 100 bouches qui s’ouvrent. » parution éphémère où ses revendications sont toujours d’actualité : « Vivre et travailler au pays est une revendication à satisfaire par tous les moyens. Avoir le droit et le désir de vivre où l’on veut , sous d’autres cieux, c’est un droit individuel absolu. »

En 1975 , les éditions L’Harmattan éditent Tienbo le rein et Beaux visages cafrines sous la lampe, avec quelques modifications par rapport à la première édition.

 

La place de son oeuvre dans la littérature

Dans ces textes militants, Alain Lorraine se positionne clairement comme chrétien de gauche, dédie ces poèmes aux « z’enfants la misère »

 

en décrivant les hommes déracinés :

« Des hommes sans nom jetés dans la gueule des cyclones

jetés hors du Mozambique sans la tribu des transes

hors du Coromandel sans les temples du safran

hors des récifs de Bretagne sans la houle des pardons

des hommes vaincus par le vide dans le silence des racines. »

(Extrait de Visages Archipels)

 

en décrivant les femmes, leurs labeurs :

« Ces femmes avec des robes à bout de sous

Elles descendent très tôt au cuit de l’aube vieillie

Elles descendent les pentes des champs

Une famille dans la main

La fatalité dans leurs yeux. »Ces femmes ...

 

 

Son deuxième recueil est édité en 1990, Sur le Black, le black étant le bitume en créole . Bitume sur lequel a été assassiné un jeune homme pour des raisons politiques. Le Black c’est également le monde noir. A son propos, Alain Lorraine précise :

« Tienbo le rein a été le livre de la bonne conscience.[...] J’essaie de faire de plus en plus de livres de l’inconscient. »

Ce livre souligne ses aller-retour réunion-métropole mais la mélancolie toujours l’habite :

 

 

« nous n’avons pas résisté

nous ne savons plus résister

forteresse vide de cette figure d’île

tellement aimée des pluies des navires

Tellement aimée

grande fleur fanée. »

 

Le poète se console grâce à l’amour, les femmes

« cette bien belle négresse

engrossée dans les champs

par un descendant d’italien »

 

Dehors est un grand pays Son dernier recueil poétique paru en 1993 est un cheminement fait de rencontres, il s’agit d’une sorte d’odyssée de l’intime écrite à la première personne.

« Je ne suis pas de reniement. Je ne suis pas d’enfermement. Et Dehors est un grand pays, tu sais. »

 

Tout le long de son œuvre, il évoque le Maloya, la mémoire du chant des esclaves

« Pays-Maloya

Comme un cri d’espoir à qui on passe les chaînes

les barbelés, les prisons,

Comme une plainte de vieille servante damnée

sous la misère

Comme une peur d’enfant dans la nuit tropicale

Notre Maloya d’or et de tristesse chante pour vous tous »

(Extrait de Pays maloya)

 

Pour lui « Chaque peuple a son talent , c’est-à-dire sa vérité, son secret, son chemin. » Ce talent, le maloya, est devenu « l’opéra de tout un peuple ».

Alain Lorraine passe ses dernières années à Paris où il s’éteint le 18 mai 1999.

 

 
Bibliographie
Poésie
-Tienbo le rein, Beaux visages cafrines sous la lampe-L'HarmattanI975-Prix des Mascareignes 1976.
-Sur le black-récit et poèmes-Éditions Page libre- La Réunion-1990.
-Poèmes accompagnant les sculptures d'Eric Pongérard.
-Dehors est un grand pays-Paroles d'Aube-Vénissieux-1993.

 

Essais et autres écrits

 

-Les Chrétiens du désordre-Calmann-Lévy 1979 (Essai reportage de sociologie religieuse sur 1'engagement politique des Chrétiens en France..)

-J’habite les Hauts Champs, puisque je viens d’ailleurs – chronique- N° Spécial Hem-Revue Aube Magazine-1995.

-Une communauté invisible : 175000 Réunionnais en France métropolitaine, avec Wilfrid Bertile Essai-Éditions Karthala-1996.

-Jeamblon où les Petites libertés-Nouvelles et chroniques-Éditions Karthala et Éditions Grand Océan-1996.

-Histoires de silence, … du marronnage au mondial-pièce de théâtre-1998-inédite.

-La Réunion, île de mille parts- Actes Sud-2001 (Edition posthume)


 

 

 

Parenthèse poétique

 
 

LES FEMMES DE L'EAU

 

 

A six heures de leur matin

Passent les lavandières

Ici on ne les appelle pas : «Lavandières»

C'est un mot trop savant

Etouffé dans un livre

A six heures de leur matin

Elles avancent au fond

de la rivière

Les bonnes

Les servantes

Les vieilles femmes de la cour

Les mères gardiennes

de la marmaille

Et leurs mains noires,

blanchies par la fatigue,

écument les roches

écument les jours

et leur dos courbé

longtemps sous le soleil

et leur silence filtrant

toute la rivière

et leurs enfants,

éclat de pleur entre deux jeux

Mesurent toutes les peines

Retiennent tous les rires

 

A six heures de leur nuit

repartent

Les bonnes

Les servantes

Les vieilles femmes de la cour

Les mères gardiennes

de la marmaille

La tête gonflée

par une lourde charge du linge des autres

Leurs jupes à bon marché,

Colorées naguère,

Ruinées par la misère,

Remontent l'escalier de pierre

Et elles s'en vont

Les femmes de l'eau

Vers les travaux du soir

Le mari du soir

Les enfants du soir

Les soucis du soir.

Et la nuit qui tombe sur leur peau

fait exploser le silence de la case

Et cambriole en silence

les six heures de leur sommeil

en attendant ...demain matin

au fond … de la rivière


 






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