Le 10 Mai: SE SOUVENIR ET AGIR


Jeudi 10 Mai 2012

Il y a 11 ans exactement, sous la Présidence de M. Jacques Chirac, le Parlement français adoptait la loi dite "Taubira", qui appelle tous les citoyens au souvenir de l'esclavage et de la traite.
C'est une date à laquelle je suis attaché; elle ne concurrence bien évidemment pas notre 20 décembre, mais elle le complète, puisqu'elle prend sa signification à l'échelle de toute la République.
Le but de cette journée est de faire prendre conscience des ignominies commises dan le passé, lorsque des hommes et des femmes pouvaient être réduits à l'état de "bien meubles" par ce document terrible qu'était le "Code Noir".
Cette commémoration appelle, aussi, à réfléchir sur les formes contemporaines d'exploitation et d'oppression.
Soit l'esclavage lui-même, qui se perpétue tel quel ou sous la forme de salariats ultra-précaires, soit à des formes de domination plus difficiles à identifier, qui marquent encore nombre de pays.
Oui, l'esclavage est aboli, mais il continue de marquer les structures de notre société. En témoigne, le statut de nombreux Réunionnais descendants d'esclaves, qui sont souvent ceux qui subissent, toujours et encore, les discriminations et les injustices sociales.
Le 10 Mai est l'occasion pour nous de prendre conscience de tout cela. Mais il ne faudrait pas que cette journée du souvenir ouvre les portes de la repentance.
La mémoire est un devoir, elle appelle a être debout, et non pas, encore et toujours, à genoux pour mendier. Et encore moins pour enfermer la signification d'un crime universel, dans les limites d'intérêts particuliers.
Ni l'histoire, ni la mémoire n'appartiennent à des porte-parole auto-proclamés.
Ces propos, je les ai tenus en présence de François Hollande, alors candidat, face à ce lieu symbolique qu'est le cimetière dit du "Père Lafosse".
Aujourd'hui, je me souviens, et ce souvenir ravive le désir de me battre. De me battre pour le respect, pour l'égalité, pour la reconnaissance de la valeur de toutes et tous ceux qui peuplent la Terre.
La Réunion donne l'image de cette faculté qu'ont les hommes de vivre ensemble leurs différences. Elle en illustre aussi les difficultés, et la profondeur des cicatrices héritées de l'Histoire.
Identifier le chemin du passé, en gravir les marches, et se hisser vers l'avenir: tel est le sens de mon combat. Et je garde à l’esprit cette pensée de Saint-Exupéry : « ta différence, mon frère, loin de me léser, m’enrichit ».


Le 10 Mai: SE SOUVENIR ET AGIR

Yvan Dejean