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Vie chère : les prix ne sont pas prêts de baisser !


Économie
Lundi 26 Novembre 2012

Sans doute, la loi, dite "Lurel", publiée au journal officiel la semaine dernière, a-t-elle le mérite d'exister. Elle est une tentative de réponse à la vie chère dont est victime la grande majorité de la population ultra marine. Dans cette perspective, force est de constater que la capacité d’intervention des pouvoirs publics est accrue, avec un impact direct attendu sur certains prix (I). Cependant, l'essentiel des mesures n'aura qu'un effet incertain, malgré l’instauration du fameux “bouclier qualité prix"(II).


I – La capacité d’intervention des pouvoirs publics est accrue avec un impact direct sur certains prix...
 
Par cette loi, l’Etat entend se donner les moyens de lutter contre les monopoles et les oligopoles en réglementant davantage les conditions d’approvisionnement en biens et services des marchés ultra marins ainsi que l’organisation de la distribution ( article 1).
 
Dans ce cadre, les mesures les plus concretes sont  notamment :
  • la réservation d’une surface de vente dédiée aux productions régionales dans les grandes surfaces (article 4),
  • l’interdiction des accords aboutissant à l’octroi de droits exclusifs d’importation sauf motifs dûment justifiés (article 5),
  • le renforcement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence qui pourra faire annuler des contrats ou s’opposer à des projets anticoncurrentiels ( articles 10 et 12).
En outre, le texte confirme également la possibilité déjà donnée à l’Etat par la loi “Jego” ( Loi pour le développement économique des outre-mer – LODEOM) de réglementer les prix des produits de première nécessité (article 15),  faculté n’ayant jamais été mise en oeuvre.

Dans le meme ordre d’idées, il faut donc souhaiter que l’alignement des tarifs bancaires de base sur la moyenne des tarifs pratiquée dans l'Hexagone (article 16) entre quant-à-lui rapidement en application.
 
Car en definitive, c’est la seule véritable mesure de continuité territoriale économique à effet immediat. Elle doit pouvoir garantir
rapidement, dans ce domaine, une parité des prix entre la France hexagonale et les départements d’outre-mer.

II -… mais l'essentiel des mesures n'auront qu'un effet incertain malgré l’instauration du fameux "Bouclier qualité prix".
 
Pour le reste, les effets de la loi sont incertains. En décidant d’agir avant tout sur la structuration des marchés et la transparence des prix et des marges, le Gouvernement Ayraut s’inscrit dans la continuité des orientations fixées dès 1996, à l’issue des Assises du développement organisée par le Gouvernement Juppé. C’est ainsi que les conditions d’exercice des missions des observatoires des prix, des marges et des revenus sont reprécisées et renforcées (Article 23).
 
Cependant, avec près de 16 ans de recul maintenant, on peut légitimement s’interroger sur le bien fondé de cette demarche qui n’a manifestement pas réussi à modérer la croissance des prix Outre-mer.
 
Pour la période de janvier 1990 à décembre 2007, les données de l'INSEE et de l’IEDOM montrent que l'inflation a été généralement plus importante dans les départements d’outre-mer que dans l’Hexagone. La croissance des prix a été de  47,5 % à La Réunion, de 44 % en Martinique et de 39,1 % en Guadeloupe contre 38,6 % en métropole. Seule la Guyane a connu un taux d'inflation moindre (37,9 %).
 
En définitive, garantir des conditions d’exercice de la concurrence comparables à celles de la France métropolitaine supposerait de s’attaquer à l’éloignement, à l’insularité, à l’étroitesse du marché et donc de s’employer à la mise en œuvre d’une véritable continuité territoriale.  Outre la réglementation des prix, celle ci passe obligatoirement par une diversification des sources d’approvisionnement, un subventionnement du transport, une aide à la production locale et une réforme profonde de l’octroi de mer.
 
Elle exigerait sans doute une augmentation de la dépense publique en faveur des DOM ou plus certainement, dans le contexte actuel de crise des finances publiques, la remise en cause de nombre d’avantages acquis (sur rémunération des fonctionnaires, abattement de 30% sur l’impôt sur le revenu…). C’est à dire une prise de risques politiques déjà tentée en 1996 et qui n’a pas été payante.
 
En attendant une vraie priorité accordée à l’Outre-mer, davantage de courage politique, ou que la nécessité finisse par imposer sa loi, les ultra marins devront donc sans doute continuer à se contenter de faux semblants ou d’expédients.
 
A l’image du « bouclier qualité prix » (article 15) qui est sans doute la mesure la plus symbolique de la loi «Lurel ». En effet, la loi se limite à faire référence à un accord de « modération » des prix avec les organisations professionnelles, sans fixer d’objectifs ni en terme de niveau des prix, ni en terme de nombre de produits. Il ne faut sans doute pas attendre plus de cette mesure que la pérennisation, sous une autre forme, de l’accord ayant abouti à la mise en place des « produits solidaires », financés par le Conseil général.
 
Au mieux, les prix de ces produits ne vont pas augmenter et le coût de la mesure ne devrait plus être supporté par la fiscalité locale. Verdict au 1er janvier 2013 ! 

Hugues Maillot

Ci-dessous le lien pour accéder au texte de loi définitif :

www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/ta/ta0030.pdf

Hugues Maillot



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