BIENVENUE, MONSIEUR LE PRESIDENT....


Lundi 2 Avril 2012

Ci-dessous, le texte de mon intervention lors de la visite de François Hollande à Saint-Louis, au cimetière dit "du Père Lafosse".



Cher candidat,

Face à nous, les murs du cimetière dit du Père Lafosse renferment le souvenir des Réunionnais morts sans sépulture. Depuis 2009, une stèle s’y élève, pour que nos ancêtres, dépouillés de droits jusque dans la mort, ne soient plus jamais ignorés.
De ce lieu, nous avons voulu faire un lieu de mémoire. De souvenance, dit le Créole. Mais, cher François Hollande, pour nous, souvenance n’est pas repentance. Et lorsque nous plantons un jalon de notre mémoire et de notre identité, ce n’est pas pour obtenir une réparation en nature ou en bons sentiments. Ce geste, c’est celui d’un peuple qui avance. D’un peuple qui ne se plaint pas de son passé, mais se hisse sur son héritage et s’engage, sans se renier,  sur la route du changement.

Oui, cher candidat, le passé pèse lourd sur nos terres . Cette histoire courte, marquée par le colonialisme, trois siècles, l’esclavage, presque deux siècles, l’engagisme, un peu moins d’un siècle, cette histoire laisse des traces. Elle laisse des traces dans les mentalités, et dans l’espace. Voyez, cher François Hollande, le tracé des communes de notre île ! Il y en a seulement 24, pour 2500 m2.  
Ce découpage est issu des  anciens « quartiers », définis à partir des limites des grands domaines sucriers, mais aussi des lignes de défense contre les Noirs marrons. Voyez la géographie du développement et la géographie mentale, qui sépare les Hauts et les Bas . Espace de travail, dit-on des Hauts, voués à demeurer un terroir.  Espace de représentation, dit-on des Bas,  qui devraient être le seul lieu là où les choses se passent et avancent.

Vous êtes aujourd’hui, cher candidat, parmi ceux qui font bouger les lignes. Parmi ceux qui veulent soulever les rocs. Même si, comme Sysiphe auquel vous vous êtes comparé, nous nous savons voués à les porter encore et encore. Et nous n’avons, pour cela, d’autre idéologie que la foi dans le progrès et le développement.

Le progrès, c’est le développement des hauts, avec le prolongement du grand édifice de la Route des Tamarins. C’est la fin, pour les Hauts, de l’inégalité devant le service public. C’est le droit enfin réalisé, d’avoir à disposition de l’eau potable et pour les exploitations agricoles.

Mais le progrès, c’est aussi une mutation des cadres politiques de l’action locale. Soulever le poids du passé et prendre nos responsabilités, c’est structurer nos territoires en rapport avec les réalités d’aujourd’hui. Pour cela, nous avons adopté et fait adopter l’idée de La Rivière, 25eme commune. Et je suis heureux de saluer en vous l’homme de ce changement majeur, qui va accroître la cohérence de nos populations, et nous mettre  sur la voie de la démocratie locale. Voilà, pour nous, un signe sans équivoque, voilà l’engagement, voilà la certitude que le changement, c’est maintenant ! 


Yvan Dejean