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Requins : quand les maires jouent avec le feu


Citoyen
Mardi 28 Juillet 2015

Le maire ne peut ignorer qu'en matière de sécurité publique il ne peut déléguer son pouvoir de police et les responsabilités qui y sont attachées : dans tous les cas, sa responsabilité restera engagée en cas d'accident.


Requins : quand les maires jouent avec le feu

Le conseil municipal de la mairie de St-Leu du 30 avril 2015 a entériné la décision de signer avec le comité des pêches (CRPMEM) la convention pour la mise en place du programme CapRequins 2.
 
A cette occasion, le 4ème adjoint M. Guinet s'est insurgé contre ce gaspillage éhonté d'argent public en période de restrictions budgétaires « dans des dispositifs plus ou moins fumeux » (presse du 2/05/15), mettant largement en doute la sûreté de ce dispositif « expérimental » et son efficacité vis-à-vis de la sécurité du public.

Les associations de notre collectif ont aussi maintes fois insisté sur l'attraction exercée par les appâts sur les requins du large, les faisant se rapprocher des côtes et aboutissant à l'effet inverse de celui recherché : la sécurisation des baigneurs et des pratiquants d'activités nautiques.

M. Guinet s'était vu rétorquer : « Monsieur le député-maire fait état d'une modification apportée à la convention telle que présentée par le CRPMEM qui dégage la responsabilité de la commune en cas d'attaque de requins dans la zone relevant de sa compétence territoriale, quelle que soit l'activité effectuée par la victime, dans la mesure où le caractère inoffensif du dispositif de pêche ciblée n'est pas encore démontré » (page 14 du PV).
 
Une astuce gros doigts s'il en est. Le maire ne peut ignorer qu'en matière de sécurité publique il ne peut déléguer son pouvoir de police et les responsabilités qui y sont attachées : dans tous les cas, sa responsabilité restera engagée en cas d'accident.

Le conseil d'Etat en a décidé ainsi dans plusieurs arrêts, notamment celui du 4 octobre 1961 (Dame Verneuil) relatif à une commune présentant le caractère d'une station balnéaire qui avait confié à un particulier l'exploitation des baignades sur son territoire en le chargeant dans la convention d'assurer diverses mesures spécifiées en vue de la protection des baigneurs.
Idem pour une décision du tribunal administratif de Pau (19 décembre 2000), relative à une convention passée entre la commune du Vieux-Boucau et le SDIS des Landes, dans laquelle les pompiers s'engageaient à fournir les moyens en personnels de surveillance et de sauvetage pour la saison estivale 1992 : à l'occasion d'un accident, rien n'a pu exonérer la commune de sa responsabilité.
 
Ce genre de mention écrite n'a en fait aucune valeur légale.
Voir à ce sujet l'arrêt du conseil d'Etat du 5 mars 1971 (n° 76.239, Sieur Le Fichant) relatif à un accident survenu dans une rivière : « (…) que la circonstance qu'en 1952, le maire aurait diffusé à divers groupements et municipalités une circulaire déclinant toute responsabilité en cas d'accident pouvant survenir au lieudit "la baignade de Barjouville" ne saurait exonérer la commune de sa responsabilité ».
 
Le mauvais état des finances de la commune, évoqué à plusieurs reprises lors du conseil municipal du 30 avril, pourrait être mis en avant pour tenter de la dédouaner. Mais là encore le conseil d'Etat en a déjà jugé autrement.

Voir l'arrêt du 25 septembre 1971 (n° 73.707, commune de Batz-sur-Mer) : « (…) que ni la modicité des ressources de la commune, ni le fait que certaines communes se trouveraient grevées de charges supérieures à d'autres en raison de leur situation géographique, ne sont de nature à faire échapper la commune de Batz-sur-Mer à ses obligations ; que c'est à bon droit qu'il en a été décidé ainsi par les premiers juges ».
 
On le voit : aucune échappatoire possible.
En matière d'activités nautiques, à partir du moment où le maire juge bon d'organiser et de délimiter en mer les activités en question, il engage sa responsabilité en cas d'accident, c'est inéluctable. Et signer une convention avec le CRPMEM dans le but affirmé d'améliorer la sécurité des pratiquants, c'est effectivement organiser ces mêmes activités.

Alors la fameuse mention par laquelle le député-maire s'en laverait les paluches au cas où un surfeur se ferait à nouveau croquer sur le territoire de sa commune relève de la pure galéjade. A se demander s'il existe un service juridique à la mairie de Saint-Leu…..
 
Les maires des communes littorales de la Réunion seraient bien inspirés d'y réfléchir à deux fois avant de signer les yeux fermés avec le CRPMEM : il y a sûrement plus d'une anguille sous roche !
 
                                                                                                         Didier DERAND
                                                                                                         Fondation Brigitte BARDOT          
                                                                                                         Association VAGUES
 




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