inforeunion : Un regard Réunionnais - Ile de La Réunion - Océan Indien
sak ifé nout jordu ék nout demin

Le naufrage sanglant de la politique anti-migratoire de l’UE : L’Europe nous fait honte !


Politique
Jeudi 23 Avril 2015

Depuis le début de l’année, 1 600 migrants ont trouvé la mort dans le détroit de Sicile (3500 en 2014) et une trentaine au large de Mayotte. Face à ces catastrophes, si l’Europe austéritaire est absolument responsable, nous devons tous nous sentir concernés tellement le sang se dilue dans la mer Méditerranée et tout au nord du canal du Mozambique. Ici, il n’est pas question de requin, mais bien de la responsabilité de l’Homme. Nous ne pouvons plus accepter un tel massacre, qui n’est que l’apanage des politiques libérales et outrancières de nos dirigeants nationaux et européens.


Source : Dessin de Capdevilla publié dans Courrier International en septembre 2014.
Source : Dessin de Capdevilla publié dans Courrier International en septembre 2014.

Le nouveau chavirage, survenu dimanche 19 avril à 130 kilomètres de la Libye, est probablement la plus grande catastrophe de l'histoire de la Méditerranée. Sur 900 passagers, certains embarqués de force sur un chalutier pourri et dont une bonne partie était enfermée par les trafiquants dans les cales, seulement 28 personnes ont pu être secourues. Cette catastrophe est celle de trop, celle qui doit faire bouger les consciences. Jusqu’à quand devrons-nous faire la politique de l’autruche ? 

Pourtant, la réponse de l’Europe est symptomatique de son indifférence. Nulle coalition internationale ne s’est dressée pour y répliquer. Tout juste un sommet européen a-t-il été convoqué avec les ministres de l’Intérieur et des Affaires Étrangères. L’indifférence est ici le masque de la culpabilité. Car l’Europe a bien une responsabilité globale dans cette catastrophe. Pour avoir délibérément diminué ses moyens et choisi d’abord de protéger nos côtes plutôt que sauver les clandestins en mer. Le plan Mare Nostrum (110 millions d’€ par an, 900 hommes et 10 navires) avait permis de sauver 170000 vies en 2013, aujourd’hui l’opération Triton doit faire face à une recrudescence du flux migratoire clandestin avec trois fois moins d’argent. Il faut dire que les coupes budgétaires de la politique austéritaire européenne sont passées par là. Alors tant pis si près de 200 enfants sont morts noyés depuis le début de cette année. A Calais, les migrants clandestins qui vivent de bric et de broc par des températures négatives en hiver, ont presque tous connus cette traversée de la mort. Par exemple, Khalid, un enseignant Soudanais de 40 ans qui a fui sa région, le Darfour, en guerre. Il raconte avoir perdu 4 de ses camarades au moment d’un chavirage pendant la traversée. Sont-ils responsables de leur sort ? Absolument pas. 

L’Europe est également responsable pour avoir mené des opérations militaires qui ont détruit plusieurs États dont sont issus les migrants : Libye, Mali et Somalie.  Aujourd’hui, que font les États européens pour pacifier et interdire les centaines de milliers d’armes en circulation en Libye ? Rien. C’est de notre responsabilité d’aider à stabiliser ces États, ce n’est pas le tout de défaire Khadafi en Libye, il faut aider à reconstruire. L’Europe est aussi responsable d’avoir ruiné et affamé l’Afrique en libéralisant de force son agriculture et son industrie. Par des accords ultralibéraux avec les pays Africains, l’UE a notamment exigé la suppression totale des droits de douane sur 80% des produits et des services. Les conséquences sont dramatiques. Les États africains ont été incapables de rivaliser avec les produits européens compte tenu des écarts de productivité et des aides à l’exportation européenne. Nombre de petits paysans en Afrique ont été contraints d’arrêter leur exploitation et de se masser dans les villes en se précarisant. Quelle logique mortifère que de voir des poulets européens vendus moins chers que des poulets locaux en Afrique ! Ce n’est pas tout, les grandes firmes de l’agrobusiness européennes se sont emparées de millions d’hectares dans ces pays pour y développer des productions destinées exclusivement à l’exportation, privant ainsi les paysans de terre et rendant les populations hyper dépendantes de la spéculation sur les matières premières agricoles.

Même chose à Mayotte, les politiques migratoires françaises et européennes sont responsables du désastre humain. Rappelons que c’est le gouvernement Balladur en 1995 qui décidait d’entraver la circulation des personnes dans l’archipel des Comores en imposant un visa d’entrée à Mayotte. Pourtant depuis des siècles, des petites embarcations appelées « kwassas » allaient d’île en île parce qu’entre ces populations il y avait d’importants liens sociaux, familiaux et professionnels. 

Vous le savez, les migrants sont des personnes extrêmement courageuses qui souffrent et sont les victimes de trafiquants. N’oublions pas que ces migrants ont dépensé des fortunes au péril de leur vie pour survivre, pour quitter la guerre et les problèmes. Derrière les migrants se cachent des femmes et des hommes comme nous, des familles avec des enfants en bas âge. Ce n’est donc pas à eux de payer l’incurie des autorités européennes !

Alors que devons-nous faire ? Certainement pas un saupoudrage de mesures comme il a été décidé mardi à Luxembourg. A court terme, traiter l’urgence. Renforcer le dispositif de secours aux migrants en haute-mer. Être ferme avec les passeurs. Augmenter les possibilités de migrer par les voies légales et abolir le « visa Balladur » pour Mayotte. Appliquer la directive européenne 2001/55/CE qui prévoit de mettre en place une protection immédiate et temporaire des personnes déplacées notamment en raison d’une guerre, de violences ou de violations des droits de l’homme en assurant un équilibre des efforts réalisés par les États membres pour les accueillir. Aujourd’hui, ce n’est pas normal que seules la Grèce et l’Italie supportent l’essentiel de ces flux et que 75% des demandes d’asile sont gérées par seulement 6 États membres sur 28. Mais il faut surtout agir durablement. Il faut aider les États africains à protéger leurs ressources en remontant les droits de douanes, il faut apporter la technologie et la formation pour développer l’industrie et l’agriculture de ces pays. Il faut aider les pays à démanteler les réseaux de trafiquants. Enfin, il faut aider ces États à se stabiliser, notamment en désarmant les gens.  

Ce que nous voyons n’est absolument pas digne de l’Europe sociale que nous entendons construire. Les migrants veulent vivre dignement et travailler comme tout être humain. Ce n’est que lorsque les personnes ne se sentiront plus en danger de mort, qu’ils ne prendront plus le risque de perdre leur vie dans un rafiot pourri.

 

 

 


François FASQUEL



      Partager Partager

Les commentaires

1.Posté par Bayoune le 23/04/2015 07:33
Ces morts nombreux, de femmes, des homme et des enfants, venant comme par hasard de l'Afrique, un peu comme hier pendant la période esclavagistes - ce sont les mêmes criminels d’hier et d’aujourd’hui de ce nouveau génocide, je n'ose pas employé shoah, ce mot serait une réserve de crime!!!. Cette déportation de gens chassés de leur pays par des occupants ou leurs chiens de garde de l'Afrique dominée, sacrifié pour engraisser le monde blanc de l'Europe - qui rejette leur victime à la mer pour qu'ils aient plus de liberté à piller le pays. C'est un peu ce qui se passe dans la colonie réunionnaise, disons plus proprement, à l’échelle réduite ? nos enfants sont déportés pour servir de bonne à tout faire, d'esclaves dans les entreprises de leur France de leur Europe, et l'occupant occupe un peu partout dans les administrations, dispose de Sinzil'land,. Rèzman na rokin patriote, i tante de réduire cette population importé, ces envahisseurs.

Nouveau commentaire :
Facebook Twitter


Dans la même rubrique :
< >

Vendredi 17 Juin 2022 - 11:41 Jean Jacques MOREL aime son Pays

Lundi 7 Septembre 2020 - 15:00 Alain BENARD : Candidat sur la 2e